Démographie

 

Depuis la proclamation de la République populaire, le pays a connu trois recensements de population : il y avait ainsi 582,6 millions d’habitants en 1953, 1 milliard en 1982 et 1,14 milliards d'habitants en 1990.

En 2001, le pays, avec une population estimée à 1,27 milliards d'habitants (environ 21 p. 100 de la population mondiale), est le plus peuplé de la planète. Depuis le début des années soixante-dix, les autorités chinoises ont lancé une politique de contrôle des naissances, avec pour objectif une stabilisation de la population à 1,2 milliard d’habitants en l’an 2000. Depuis le recensement de 1982, le taux de croissance de la population a ainsi connu une diminution spectaculaire.


 

1. La croissance démographique

 

La Chine a connu, dans la seconde moitié du XXe siècle, une transition démographique accélérée. La première phase, amorcée au début des années cinquante, s’est traduite par une explosion démographique. Entre les recensements de 1953 et de 1990, la population a doublé (+ 615 millions habitants), malgré la crise démographique dite des « années noires » (1959-1961), ayant provoqué un déficit de naissances évalué à 60 millions d’individus. L’indice synthétique de fécondité était alors entre 5 et 6 enfants par femme (5,8 en 1970).

L’entrée dans la deuxième phase de la transition démographique, marquée en Chine par une baisse rapide de la fécondité, s’est amorcée vers la fin des années soixante-dix. L’indice de fécondité est tombé à 3,26 entre 1975 et 1980 puis à 2,4 entre 1985 et 1990. Il s’élevait, en 2001, à 1,82 enfant par femme.

Le taux d’accroissement naturel, de l’ordre de 2 à 3 p. 100 par an durant la première phase de la transition démographique (2,6 p. 100 en 1969), est retombé à 1,1 p. 100 par an entre 1990 et 1995. Il est estimé à 1,02 p. 100 pour la période 1995-2000. Le taux de natalité est passé de 45 p. 1 000 en 1953 à 21 p. 1 000 en 1990, pour atteindre 15,95 p. 1 000 en 2001. Dans le même temps, le taux de mortalité serait tombé de 22,5 p. 1 000 à 6,74 p. 1 000. Cette faible mortalité s’explique par la jeunesse actuelle de la population. En 2001, 25,8 p. 100 de la population chinoise avaient moins de 15 ans, 67,6 p. 100 entre 15 et 65 ans et 7,1 p. 100 (2001), seulement, plus de 65 ans. La population est masculine à 51,41 p. 100.

Grâce aux progrès de la médecine et au développement des soins (0,94 médecin pour 1 000 Chinois contre 0,71 en 1975), notamment en milieu rural (« médecins aux pieds nus »), l’espérance de vie à la naissance, de l’ordre de 35-40 ans au début des années cinquante, a fortement augmenté et atteint désormais 71,6 ans (2001). Ce phénomène, conjugué au régime de basse natalité, devrait entraîner un vieillissement progressif de la population, sans doute l’un des grands problèmes auxquels sera confrontée la Chine du XXIe siècle. Les inégalités sont toutefois très fortes selon les provinces (jusqu’à 12 ans d’écart).


2. Le contrôle des naissances

 

Fondée il y a deux mille ans, Pékin (Beijing) est la capitale politique de la Chine mais seulement la deuxième ville du pays après Shanghai. Elle fait partie des dix agglomérations les plus peuplées du monde. Sur le mur, une affiche témoigne de la campagne en faveur de l'enfant unique.

Le très net ralentissement de la croissance démographique est le résultat de la politique de limitation des naissances développée par les autorités chinoises à partir du début des années soixante-dix. Celle-ci prit une tournure fortement incitative et contraignante en 1979 avec la politique de l’« enfant unique ». En septembre 1982, la direction du Parti communiste chinois annonça que la nation devait limiter sa population à 1,2 milliard d’habitants pour la fin du siècle, et que cet objectif nécessitait une intensification des efforts de contrôle démographique. Ce chiffre, déjà dépassé en 1994, a dû être révisé à la hausse et il apparaît que la population chinoise ne devrait réellement se stabiliser qu’aux alentours de 2050.

Les politiques antinatalistes s’accompagnèrent d’un renforcement continu des services de santé publique, chargés de l’information sur le contrôle des naissances et de la distribution gratuite ou à faible prix de moyens contraceptifs. En 1984, on estimait à 24 millions le nombre de couples s’étant engagés à ne pas avoir plus d’un enfant. La limitation de la natalité est aujourd’hui entrée dans les mœurs. La contraception est largement diffusée : près de 90 p. 100 des femmes mariées en âge de fécondité y ont désormais recours. L’élévation de l’âge du mariage (22-23 ans, l’âge légal étant de 20 ans) et la légalisation de l’avortement ont également joué un rôle important dans la baisse de la fécondité.

Toutefois, la politique de l’enfant unique se heurte à de nombreuses résistances, notamment dans les campagnes où l’immense majorité des Chinois restent pauvres et peu informés. De fortes pressions sociales s’exercent sur les femmes ayant déjà au moins un enfant pour qu’elles interrompent leur grossesse. Un des effets de la libéralisation des mœurs et de l’évolution économique de la Chine est l’augmentation du nombre de divorces ; le taux de divorces est passé de 0,35 en 1980 à 1,5 p. 100 en 1995.

 

3. La répartition de la population

 


La structure en bois est soutenue par des piliers. Le toit, aux lignes incurvées, est fait de tuiles. L'avant-toit est supporté par des poutres sculptées.

La densité moyenne atteint 133 habitants au km², mais elle masque de très fortes disparités régionales. La répartition de la population montre en effet une opposition majeure entre la Chine de l’Ouest, où la densité moyenne n’excède pas 10 habitants au kilomètre carré (Tibet : 1,8) et la côte orientale, du Liaoning au Zhejiang, très densément peuplée, avec plus de 360 habitants au kilomètre carré (près de 2 200 à Shanghai). Ainsi, 43 p. 100 des habitants vivent sur 18 p. 100 de la superficie totale du pays. Il s’agit des régions côtières orientales où se concentrent les richesses, les grandes villes et les grandes plaines agricoles : Hebei avec Pékin et Tianjin ; Fujian ; Guangdong ; Hainan ; Heilongjiang ; Jiangsu avec Shanghai ; Jilin ; Shandong ; Zhejiang ; Liaoning avec Shenyang. Environ 44 p. 100 de la population occupent les provinces du centre de la Chine (Anhui, Guizhou, Hubei, Henan, Hunan, Jiangxi, Shaanxi, Shanxi, Sichuan) qui représentent 20,6 p. 100 du territoire. Enfin, 13 p. 100 seulement résident en Chine occidentale et sur les marges mongoles (Gansu, Guangxi, Mongolie-Intérieure, Ningxia, Qinghai, Tibet, Xinjiang, Yunnan) qui couvrent 61,4 p. 100 du pays.

La population chinoise, encore fortement rurale (66 p. 100), reste donc essentiellement concentrée dans les 19 provinces historiques de la Chine. L’entassement humain de la Grande Plaine du Nord et du bas Yang-tseu-kiang, massivement peuplés par les Han, contraste singulièrement avec les rares îlots de peuplement de la Chine de l’Ouest (oasis, haute vallée du Brahmapoutre). Ce déséquilibre est l’expression du modèle de peuplement et d’occupation de l’espace développé par les Chinois (Han), pour lesquels on peut parler de civilisation agricole de plaine, reposant sur la riziculture intensive. À l’inverse, la Chine occidentale et, d’une manière plus générale, les montagnes, sont longtemps restées le domaine des nombreuses minorités que compte le pays. La politique de colonisation de fronts pionniers, développée depuis 1949 dans les provinces les plus reculées (Heilongjiang, Xinjiang, Mongolie-Intérieure, Qinghai, Tibet), n’a guère modifié les déséquilibres existants.

Enfin, la Chine est, depuis très longtemps, un pays d’émigration. On estime à 50 millions le nombre de Chinois, appelés Huaqiao, ayant émigré à l’étranger dont 2,57 millions en Amérique du Nord, 0,59 million en Europe et 0,16 million en Océanie. L’essentiel de cette émigration concerne en fait l’Asie, et principalement Taïwan (21 millions), l’Indonésie (6,15 millions), la Thaïlande (4,8 millions), la Malaisie (4,1 millions), Singapour (1,85 million), et, jusqu’à un passé très récent, Hong Kong (5,7 millions) et Macao (0,27 million).

 

4. Composition ethnique de la population

 

Les Han, le groupe ethnique le plus important de Chine, représentent plus de 90 % de la population. Leur histoire correspond largement avec celle de la Chine, car ils sont apparus dans ce qui est maintenant le nord de la Chine voici plus de 4 000 ans.

La Chine est une « République socialiste unitaire et multinationale ». Dans cet État pluriethnique, les Han constituent l’immense majorité de la population (92 p. 100 en 1990), les 8 p. 100 restants regroupant 55 minorités ethno-linguistiques.

Les Han se caractérisent davantage par une culture et une civilisation commune, principalement agricole, que par des traits physiques communs. La majorité d’entre eux vit dans les bassins des cours moyens et inférieurs du Huang he, du Yang-tseu-kiang et du Zhu jiang et dans la plaine du Nord-Est (Mandchourie). Un certain nombre se sont récemment implantés dans les provinces périphériques, dans le cadre de la colonisation des zones pionnières. Il s’agissait, pour la plupart, de migrations forcées.

Les Han constituent aujourd’hui la majorité de la population dans 28 provinces sur 30, à l’exception du Xinjiang et du Tibet. En Mongolie-Intérieure par exemple, ils représentent 84,5 p. 100 de la population. En 1949, les Han représentaient à peine 5,5 p. 100 de la population du Xinjiang. Aujourd’hui, ils en constituent 38 p. 100.

En dépit de leur faible poids démographique, de leur diversité ethnique et de leur dispersion spatiale, les minorités revêtent une importance géopolitique certaine, dans la mesure où elles occupent plus de 60 p. 100 du territoire et où certaines aires d’habitat constituent des zones particulièrement sensibles. Dix-huit de ces peuples comptent plus de 1 million d’individus. D’autres, au contraire, n’en comptent que quelques centaines, comme les Luobas. L’ensemble se répartit en cinq groupes : Altaïque (Ouïgours, Mandchous, Mongols, Coréens, Kazakhs), Hui (Huis), Sino-Thaï (Zhuangs, Buyis, Dongs, Lis, Dais), Tibéto-Birman (Yis, Tibétains, Bais, Hanis, Lisus) et Miao-Yao (Miaos, Tujias, Yaos). Bien que partout présentes, les minorités se localisent principalement dans les régions périphériques frontalières du nord-est, du nord, du nord-ouest, de l’ouest, ainsi que dans les provinces du sud.

Les Zhuangs (15,49 millions en 1990) vivent à 92 p. 100 dans la région autonome du Guangxi. Une grande partie d’entre eux sont fortement assimilés. Les 8,6 millions de Huis, ou musulmans chinois, sont regroupés dans la région autonome Hui du Ningxia, au Gansu et au Qinghai. Les Ouïgours (environ 7,2 millions), turcophones, peuplent la région autonome du Xinjiang, dont ils constituent la moitié de la population. Les Yis (environ 6,5 millions) sont largement sinisés et vivent surtout au Sichuan, au Yunnan et au Guangxi. Les 7,4 millions de Miaos peuplent le Guizhou, le Hunan et le Yunnan. Les Tujias (5,7 millions) vivent principalement dans le Hubei, le Hunan et le Sichuan. Les Tibétains (près de 6 millions) vivent dans la région autonome du Tibet, au Sichuan et au Qinghai. Enfin, 4,8 millions de Mongols se partagent un espace qui comprend la Mongolie-Intérieure, le Gansu et le Xinjiang.

Parmi les autres minorités figurent les Coréens (environ 2 millions) du Jilin, les Mandchous (9,8 millions) du Liaoning et du Heilongjiang, fortement assimilés, ou encore les Buyis (2,5 millions) du Guizhou. Le Xinjiang regroupe une douzaine d’ethnies, pour la plupart d’origine turque et de religion musulmane (Ouïgours, Kazakhs, Kirghiz, Ouzbeks, Tatars). Quant à la Chine du Sud-Est, elle est une véritable mosaïque ethnique. Elle abrite de nombreux peuples (Thaï, Miao, Yao, Lisu, Hani, Bai, Yi, etc.), refoulés au fil des siècles par les Han lors de leur progression vers le sud, et qui se sont réfugiés, pour la plupart, dans les montagnes méridionales (Yunnan, Sichuan, Hunan, Guangxi) délaissées par les Chinois, voire au-delà des frontières actuelles.

Jusqu’en 1964, la croissance démographique des minorités était inférieure à celle des Han. Mais cette tendance s’est inversée entre 1964 et 1990 (+ 10,8 p. 100 pour les Han, + 35,5 p. 100 pour les minorités). Ce phénomène s’explique à la fois par le réveil identitaire des peuples minoritaires et par la possibilité qui leur est généralement donnée d’avoir une fécondité plus élevée que dans les provinces orientales, de l’ordre de 2 ou 3 enfants par femme. Ainsi, les Mandchous ont connu un taux de croissance de 128,2 p. 100 entre 1982 et 1990. On peut citer, comme autres exemples, les Tujias (+ 101,2 p. 100), les Ouïgours (+ 21 p. 100) ou encore les Miaos (+ 46,9 p. 100). Les minorités, qui totalisaient 67 millions d’individus au recensement de 1982, en comptaient 91,2 millions en 1990.

Sur le plan administratif, les groupes minoritaires sont répartis entre diverses circonscriptions où ils bénéficient, en principe, d’une certaine autonomie. En réalité, et malgré une loi promulguée en 1984, cette relative indépendance est souvent régentée par le pouvoir han. Pékin tente, en effet, d’unifier le pays en encourageant ou en forçant la sinisation des régions périphériques peuplées par les minorités ethniques.

Mais l’immigration chinoise et la politique de sinisation sont fortement contestées parmi certaines minorités, notamment dans les régions autonomes du Tibet et du Xinjiang, ou dans la province du Qinghai.

De sérieuses avancées ont toutefois été enregistrées depuis la prise en compte de la réalité minoritaire. Depuis 1949, ce problème a suivi les méandres de l’Histoire, passant d’une sinisation rapide et répressive, notamment pendant la Révolution culturelle, à une assimilation plus souple. Cette dernière, fixée à long terme, privilégie le développement économique et culturel (Mongolie-Intérieure, Xinjiang). Mais la disparité des richesses et le joug pénible de Pékin insupportent de plus en plus certains peuples, tels que les Ouïgours qui n’ont pas hésité à prendre les armes en 1996. Pour l’instant, et malgré d’importants programmes d’aide et de financement, notamment en ce qui concerne l’alphabétisation, les territoires autonomes échappent au progrès dont bénéficie la Chine. L’écart socio-économique entre l’Est, prospère et dynamique, et l’Ouest, démuni et isolé, tend à s’accentuer.

L’intégration brutale n’a pas pour autant disparu. Le Tibet en est l’illustration la plus frappante. En 1950, ce pays, alors souverain et indépendant, fut envahi par l’armée chinoise. En 1959, l’ONU désapprouva officiellement cette invasion et enjoignit à la Chine de respecter les droits du Tibet. Mais cette nation allait voir son économie dévastée pendant le Grand Bond en avant, et sa croyance — le bouddhisme lamaïque — combattue de manière systématique et meurtrière. Les émeutes tibétaines de 1987 furent réprimées dans le sang.

Aujourd’hui, près de 1 million de Tibétains sont morts. Les 6 millions restants côtoient près de 7 millions de Chinois Hans, contre 2 millions en 1989, et sont désormais obligés de parler le mandarin et non le tibétain. Ils font l’objet de multiples persécutions. Enfin, Pékin utilise les montagnes du Tibet pour y stocker ses déchets nucléaires et se livre à une déforestation massive de l’Himalaya. Plusieurs centaines de milliers de Tibétains se sont réfugiés à l’étranger, et surtout en Inde, à l’image du dalaï-lama, chef spirituel, partisan de la non-violence et prix Nobel de la paix en 1989. Des protestations croissantes s’élèvent à travers le monde, mais aussi parmi les Chinois Han. Ainsi, le 13 juillet 1995, l’occupation chinoise du Tibet a été déclarée illégale par le Parlement européen.

Si les Tibétains pratiquent une résistance non-violente, les minorités musulmanes du Xinjiang, traditionnellement rebelles à l’autorité de Pékin, manifestent une opposition plus radicale. Les actions terroristes se multiplient depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Les 5 et 6 février 1997, de très violentes émeutes indépendantistes provoquant environ 70 morts et 140 blessés, à Yining, ont à nouveau embrasé la minorité ouïgoure. Elles furent sévèrement réprimées par des arrestations massives, suivies d’exécutions sommaires. Depuis, plusieurs attentats meurtriers attribués aux séparatistes ouïgours ont ensanglanté le Xinjiang et certaines villes chinoises.

 


 

 

 

 


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